Ressources Humaines

Travailler et allaiter, une équation possible ?

Pour la grande majorité des Françaises, le retour au travail entraîne le sevrage du nourrisson bien avant la durée minimale d’allaitement maternel recommandée par l’OMS. L’entreprise peut-elle être actrice d’une nouvelle envie de naturel ?
#QVT entreprise #DRH #Inspiration
05 décembre 2017

Pour la grande majorité des Françaises, le retour au travail entraîne le sevrage du nourrisson bien avant la durée minimale d’allaitement maternel recommandée par l’OMS. L’entreprise peut-elle être actrice d’une nouvelle envie de naturel ?

Ce n’est plus à prouver : l’allaitement maternel présente de nombreux avantages - tant liés à la composition et aux bienfaits du lait maternel, qu’à la relation privilégiée que l’allaitement instaure entre la mère et l’enfant. Mais cette évidence se heurte à des contraintes de taille, dont la première est… la reprise du travail. Selon une étude du CNRS (1), « c’est l’un des facteurs d’arrêt, voire de refus, de l’allaitement les plus importants dans les pays industrialisés ». En 2017, où en est l’allaitement au travail ? Comment ont évolué nos mœurs et nos mentalités ?

Trois semaines et demie !

Il ne s’agit pas d’un condensé du film d’Adrian Lyne avec Mickey Rourke et Kim Basinger, mais bien de la durée moyenne de l’allaitement des femmes françaises. Alors même que l’OMS recommande l’allaitement exclusif au sein jusqu’à l’âge de six mois…

D’après une étude réalisée en 2013/2014 par le BEH (2), près de 70 % des Françaises allaitent à la naissance de leur bébé. Elles ne sont plus que 19 % six mois plus tard. La France est ainsi l’un des pays où les femmes allaitent le moins longtemps (étude Lansinoh). Si les causes ne sont pas clairement définies, les indices socio-culturels sont sans aucun doute déterminants : « l’épanouissement professionnel est primordial pour les femmes, et souvent considéré comme incompatible avec le maintien de l’allaitement maternel », résumait le CNRS il y a cinq ans.

L’envie est là, mais la logistique a du mal à suivre

En France, le code du travail accorde une heure par jour (l’article L 224-2), non rémunérée (sauf si la convention collective le stipule) pour les salariées qui allaitent. Cependant, la période d’une heure est réduite à 20 minutes s’il existe un local d’allaitement à l’intérieur de l’entreprise (article L224-3). Ces dispositions ne sont valables que durant la première année de l’enfant.

Dans les faits, rares sont les entreprises en France qui disposent véritablement d’un local d’allaitement, même s’il est obligatoire pour les entreprises de plus de 100 salariées.

En 2017, en France, l’envie des mamans est là, mais force est de constater que l’environnement professionnel ne suit pas. Après le congé maternel - bien moins long que dans les pays nordiques - les mères doivent mettre en place une vraie logistique (tire-lait, stockage, ou domicile/crèche à proximité immédiate du lieu de travail). En Australie (ou dans les pays scandinaves, encore eux), les crèches d’entreprises fleurissent notablement plus vite que dans l’Hexagone.

Le coworking montre l’exemple

L’allaitement deviendra-t-il le nouveau défi des dirigeants pour conserver leur matière grise féminine ? En attendant, les cheffes d’entreprises indépendantes peuvent prendre les devants : de nouveaux espaces de coworking leur offrent la possibilité de faire garder leur bébé sur place, et donc d’allaiter facilement, (Cowork’Crèche à Paris, Work&Co à Dunkerque, Juggle-HUB à Berlin). Et si dorénavant, c’était aux entreprises de s’adapter à l’arrivée d’un enfant ?

(1) Bénédicte Foix. État des lieux et perspectives de l’allaitement maternel en France et dans le monde. Sciences pharmaceutiques. 2014.

(2) Salanave B, de Launay C, Boudet-Berquier J, Castetbon K. Durée de l’allaitement maternel en France (Épifane 2012-2013). Bull Epidémiol Hebd. 2014;(27):450